La constitution de partie civile permet à une personne lésée par une infraction pénale de demander réparation du préjudice subi et d’exercer certains droits tout au long de la procédure pénale. Cette démarche est ouverte à toute victime souhaitant obtenir une indemnisation financière ou défendre ses intérêts devant les juridictions répressives.

Il est important de distinguer deux situations selon que l’action publique (c’est-à-dire les poursuites engagées par le ministère public) a déjà été initiée ou non.


Lorsque l’action publique a déjà été engagée

Lorsqu’une action publique a été initiée par le procureur du Roi, la procédure de constitution de partie civile est relativement simplifiée. La victime peut se constituer partie civile à différents moments de la procédure, soit devant le juge d’instruction durant l’enquête, soit devant la juridiction d’instruction, notamment la chambre du conseil ou la chambre des mises en accusation, soit encore devant la juridiction de jugement au cours du procès.

Il est toutefois essentiel de noter que cette constitution de partie civile ne peut intervenir que jusqu’à la clôture des débats en première instance. En revanche, elle ne peut être introduite pour la première fois en appel.

La constitution de partie civile peut s’effectuer de plusieurs manières. Elle peut être réalisée par une déclaration déposée au greffe de la juridiction compétente, par l’envoi d’un courrier recommandé adressé au tribunal, ou encore par une déclaration faite oralement à l’audience.

Si la loi n’impose pas l’assistance d’un avocat pour cette démarche, il est néanmoins fortement recommandé d’y recourir, en particulier lorsque l’affaire présente une certaine complexité. L’avocat joue un rôle clé en évaluant la solidité du dossier, en définissant la meilleure stratégie pour défendre les intérêts de la victime et en chiffrant avec précision le montant de l’indemnisation demandée. Il veille également à ce que les droits de la partie civile soient pleinement exercés à chaque étape de la procédure.

 

Lorsque l’action publique n’a pas été engagée

Dans certaines situations, aucune poursuite n’a été initiée par le ministère public. Cela peut notamment être le cas lorsque le parquet décide de classer une affaire sans suite, faute de preuves suffisantes ou en raison d’une autre appréciation de l’opportunité des poursuites. Toutefois, la victime dispose de la possibilité d’engager elle-même l’action publique et de contraindre la justice à se saisir du dossier.

Deux procédures sont alors envisageables. La première est celle de la citation directe, applicable aux contraventions et aux délits. Dans ce cadre, la victime peut saisir directement le tribunal compétent en citant l’auteur présumé des faits à comparaître. Cette citation, qui constitue un acte juridique formel, doit être notifiée à la personne mise en cause par un exploit d’huissier.

La seconde procédure concerne les délits et les crimes et consiste en une plainte avec constitution de partie civile déposée entre les mains d’un juge d’instruction. Cette démarche peut être effectuée soit par une déclaration écrite ou orale auprès du juge, soit par l’intermédiaire d’un avocat. Une fois la plainte enregistrée, le juge d’instruction rédige un procès-verbal actant la constitution de partie civile, laquelle devra être confirmée lors de l’audience.

Dans ce cadre, le juge d’instruction peut exiger de la victime le versement d’une consignation, c’est-à-dire une somme d’argent destinée à couvrir les éventuels frais de procédure. Le montant de cette consignation est fixé par le juge, mais il est important de noter que cette somme sera restituée si l’auteur des faits est ultérieurement reconnu coupable. Ainsi, cette procédure offre aux victimes un recours leur permettant d’obtenir justice, même en l’absence d’initiative du parquet.


Les droits de la partie civile

En se constituant partie civile, la victime acquiert non seulement le droit de réclamer une indemnisation pour le préjudice subi, mais également des prérogatives procédurales tout au long de la procédure pénale.

Elle dispose notamment du droit d’accéder au dossier et peut, à ce titre, demander au juge d’instruction la consultation des pièces de l’enquête. Elle a également la faculté de solliciter la réalisation d’actes d’instruction supplémentaires, tels que l’audition de témoins, la mise en place d’expertises ou encore la production de nouvelles preuves susceptibles de renforcer son dossier.

Si la juridiction de jugement reconnaît la recevabilité de la constitution de partie civile, la victime peut obtenir une condamnation en dommages et intérêts à l’encontre de l’auteur des faits. Par ailleurs, elle peut intervenir dans l’exécution de la peine en étant entendue devant le Tribunal de l’application des peines, notamment lorsque des mesures d’aménagement sont envisagées, telles que la libération conditionnelle, la surveillance électronique ou la détention limitée.

Enfin, dans l’hypothèse où le juge pénal ne statue pas sur l’indemnisation, soit parce qu’aucune victime ne s’est constituée partie civile lors du procès, soit pour toute autre raison, les intérêts civils restent réservés. La victime conserve alors la possibilité de demander réparation après la condamnation de l’auteur des faits, en déposant une requête gratuite auprès du greffe. La juridiction ayant initialement statué sur l’action publique devra ensuite se prononcer sur la question de l’indemnisation.

 

Le principe du non bis in idem et ses implications pour la partie civile

Le principe du non bis in idem constitue une règle fondamentale en droit pénal, signifiant qu’une personne ne peut être poursuivie ou sanctionnée deux fois pour les mêmes faits. Il vise à garantir la sécurité juridique et à protéger les individus contre les abus en évitant des jugements ou des peines successives pour une infraction déjà jugée définitivement.

Ce principe s’applique principalement à la protection de l’accusé, empêchant qu’une personne ayant fait l’objet d’un acquittement ou d’une condamnation définitive soit à nouveau poursuivie pénalement pour les mêmes faits. Dès lors, si un jugement est rendu avec force de chose jugée, la partie civile ne peut pas solliciter une nouvelle poursuite pénale à l’encontre du même individu sur la base des mêmes éléments.

Toutefois, le non bis in idem ne s’oppose pas à l’exercice d’une action civile. En effet, même si une décision pénale est intervenue, la partie civile conserve la faculté d’intenter une action devant les juridictions civiles afin d’obtenir réparation du dommage subi. Ainsi, un acquittement au pénal n’exclut pas la possibilité d’une condamnation civile à des dommages et intérêts.

Il est néanmoins essentiel de rappeler que le droit à réparation repose sur le principe de réparation intégrale, qui interdit d’indemniser deux fois un même préjudice. Dès lors, si la victime a déjà obtenu une indemnisation au pénal, elle ne pourra pas réclamer une seconde réparation devant le juge civil pour les mêmes dommages. Cette règle vise à éviter tout enrichissement indu et à garantir un équilibre entre les droits de la victime et ceux de la personne poursuivie