Notion
La diffusion non consentie de contenus à caractère sexuel se définit par l’acte de montrer, rendre accessible ou diffuser des images ou des enregistrements audios d’une personne dénudée ou se livrant à une activité sexuelle explicite, sans son accord ou à son insu, même si cette dernière a initialement consenti à la création de ces contenus.
Avec l’évolution constante des technologies et l’expansion des réseaux sociaux, cette infraction prend une importance accrue. De nombreuses images sont publiées en ligne, et pour contrer ce phénomène, les plateformes sociales (Facebook, TikTok, X, whatsapp,…) ont dû mettre en place des équipes de modération spécialement dédiées à la lutte contre ce type de contenu.
Depuis le 1er février 2016, le législateur est intervenu en sanctionnant ces actes de peines pouvant aller de six mois à cinq ans d’emprisonnement. Cette définition permet de dégager plusieurs éléments constitutifs de l’infraction.
Premier élément : Montrer, rendre accessible ou diffuser l’enregistrement
L’infraction est constituée dès lors que l’auteur montre, rend accessible ou diffuse l’enregistrement à un tiers. Il n’est pas nécessaire que l’enregistrement soit largement diffusé pour que l’infraction soit caractérisée ; le simple fait de le montrer à une personne suffit à engager la responsabilité pénale de l’auteur.
Deuxième élément : un enregistrement visuel ou audio
L’infraction ne se limite pas à la diffusion de contenus vidéo. Un simple enregistrement audio, s’il capture une conversation ou des sons à caractère sexuel, suffit à engager la responsabilité pénale de l’auteur.
Troisième élément : l’objet de l’enregistrement
L’infraction concerne spécifiquement les enregistrements dont l’objet est une personne dénudée ou se livrant à une activité sexuelle explicite.
Quatrième élément : le défaut de consentement
Le consentement doit être continu et peut être retiré à tout moment. Ainsi, même si la victime a consenti à l’enregistrement, cela ne signifie pas pour autant qu’elle a consenti à ce que ces images soient montrées à un tiers. Il est donc impératif que le consentement à la diffusion des vidéos ou des enregistrements soit exprimé de manière claire et explicite.
La question du consentement est d’autant plus sensible lorsqu’il s’agit de mineurs. Voici trois cas de figure à prendre en compte :
- Il est strictement interdit de diffuser des images d’un mineur de moins de 14 ans, même avec son consentement.
- Pour les mineurs âgés de 14 à 16 ans, la diffusion est interdite, sauf si l’auteur de la diffusion est lui-même âgé de moins de 18 ans et qu’il a obtenu le consentement éclairé de la personne dont l’image est diffusée. Une autre exception existe lorsque l’auteur de la diffusion a moins de trois ans de plus que le mineur concerné, sous réserve, encore une fois, du consentement parfaitement éclairé de ce dernier.
- Dans le cas des mineurs de 16 ans et plus, la diffusion de leur image avec leur consentement ne constitue pas une infraction. Toutefois, cette diffusion devient illégale lorsqu’il s’agit d’une personne exerçant une autorité sur le mineur (comme un professeur particulier ou un moniteur de camp de jeunesse,…) ou en cas de relations incestueuses.
Cinquième élément : la volonté de résultat
Si la diffusion d’images par erreur était traitée de la même manière que celle effectuée délibérément, les conséquences pourraient être disproportionnées pour une personne n’ayant aucune intention de nuire et ayant agi de manière involontaire. Il est donc essentiel de distinguer ces situations, en tenant compte de la volonté délibérée et en pleine connaissance de cause d’adopter le comportement incriminé, ainsi que de l’intention de parvenir au résultat prohibé.
Cependant, il convient de rappeler qu’il est rare qu’une personne montre ou diffuse une image par inadvertance. La prudence reste de mise, mais cette distinction entre acte volontaire et erreur involontaire est importante pour éviter des sanctions injustifiées.
Le revenge porn comme circonstance aggravante
En Belgique, 1 % de la population a été victime de « revenge porn »,[1] tandis qu’en Italie, ce chiffre grimpe à 4 %.[2] C’est dans ce contexte que le législateur est intervenu avec la loi du 4 mai 2020, destinée à lutter contre la diffusion non consentie d’enregistrements à caractère sexuel. Cette loi prévoit en plus de l’emprisonnement une amende allant de 200 à 10 000 euros pour les auteurs ayant commis la diffusion dans un but malveillant ou avec l’intention de réaliser un profit.
Le juge dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour déterminer l’intention de l’auteur au moment de l’infraction, ce qui lui permet de moduler la sanction en fonction des circonstances spécifiques de chaque affaire.
Le refus de collaborer à la suppression d’images diffusées sans consentement
L’article 417/56 du Code pénal sanctionne le refus de collaborer à la suppression d’images à caractère sexuel, extrêmement pornographique ou violent, diffusées sans consentement. Le refus se manifeste par la non-exécution des actions suivantes :
- Les injonctions du procureur du Roi : Le refus de prêter son concours consiste à ignorer les ordres oraux ou écrits émanant du procureur du Roi. Ces injonctions, conformes à l’article 39bis, § 6 du Code d’instruction criminelle, imposent des délais et conditions précises que le contrevenant est tenu de respecter pour procéder à la suppression des images.
- Les décisions du tribunal de première instance : En plus des injonctions du procureur, le refus peut aussi concerner l’exécution d’une décision prise par le tribunal de première instance, en vertu de l’article 584 du Code judiciaire. Cette ordonnance définit des délais et des conditions spécifiques que le responsable technique doit suivre pour assurer la suppression des images.
Sanction : Le refus de coopérer à la suppression de ces images est puni d’une amende allant de 200 à 15 000 euros, selon la gravité de l’infraction et les circonstances particulières du dossier.
[1] https://igvm-iefh.belgium.be/sites/default/files/160_-_revenge_porn_youtoo.pdf
[2] https://www.devita.law/allez-envoie-moi-une-photo-revenge-porn-et-cicatrices-numeriques/?lang=fr